Blocage de TikTok en Nouvelle-Calédonie : le Conseil d’État recadre le gouvernement

Le Conseil d’État juge disproportionné le blocage de TikTok décidé en 2024 par Gabriel Attal en Nouvelle-Calédonie, tout en rappelant qu’une telle mesure peut être justifiée dans des circonstances exceptionnelles, sous conditions strictes.

Une mesure jugée disproportionnée

Dans une décision très attendue, le Conseil d’État a invalidé le blocage de TikTok décidé par l’ancien Premier ministre Gabriel Attal en Nouvelle-Calédonie, en 2024, lors des émeutes. L’institution estime que cette mesure était disproportionnée. Si elle reconnaît qu’un blocage peut être envisagé dans des circonstances exceptionnelles, elle insiste sur le respect de trois conditions indispensables pour qu’une telle atteinte à la liberté d’expression soit jugée légale.

Premièrement, la mesure doit être indispensable face à un événement d’une particulière gravité. Deuxièmement, aucune alternative technique ne doit permettre une réponse immédiate. Enfin, elle doit être strictement limitée dans le temps, et constituer un moyen transitoire en attendant une solution moins radicale. Or, dans ce cas précis, aucune de ces conditions n’a été remplie.

Une jurisprudence à double tranchant

Si la décision constitue une victoire pour les défenseurs des libertés numériques, notamment pour l’association La Quadrature du Net, elle soulève aussi des inquiétudes. Les avocats de la défense estiment que ce jugement, en ouvrant la porte à un blocage dans des cas exceptionnels, pourrait être utilisé dans le futur à des fins politiques, notamment par des gouvernements autoritaires ou d’extrême droite.

Ce précédent pourrait ainsi servir de base juridique pour restreindre l’accès aux réseaux sociaux, sous couvert d’ordre public ou de sécurité nationale, dans un climat de durcissement politique. Ce qui inquiète : l’ambiguïté du cadre posé, entre encadrement strict et opportunité de dérive.

Le Conseil d’État a rappelé les limites à ne pas franchir dans un État de droit, tout en laissant entrevoir une possible utilisation encadrée du blocage des réseaux. La question reste désormais : à qui profitera cette jurisprudence ?

Image – Leonardo / Canva

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